Pérou : la liberté de la presse de plus en plus menacée

Pérou : la liberté de la presse de plus en plus menacée

Au Pérou, la liberté de la presse est fragile. Les journalistes, autrefois garants de la vérité, font face à des dangers croissants : harcèlement, menaces et pressions politiques. Retour sur l’affaire Gorriti, exemple parfait de ces conditions. 

La liberté de la presse, inscrite dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, est essentielle à la démocratie. Elle permet aux journalistes d'enquêter et d'informer librement sur tous les sujets, sans contraintes. Grâce à cette liberté, la population est informée, les injustices sont exposées et les abus de pouvoir dénoncés.

Au Pérou, certains médias autrefois fiables pratiquent désormais la désinformation. Les journalistes, qui dénoncent la corruption et les malversations publiques, affrontent quotidiennement des risques considérables, y compris harcèlement et menaces. En 2019, un cocktail Molotov a explosé devant le siège du journal Voces, illustrant la violence à laquelle ils sont exposés. L'intimidation est devenue monnaie courante pour les journalistes péruviens. Ils peuvent également subir des pressions politiques, quand des membres de gouvernements tentent de contrôler le contenu diffusé ou pour limiter les critiques à leur encontre.

Ce déclin met en danger le système politique démocratique du Pérou, qui a connu la plus importante chute dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF, où il occupe le 110e rang sur 180 pays en 2023. Il est essentiel de rappeler que les médias sont capitaux pour la transparence et empêchent les dirigeants de dissimuler des informations, assurant un examen public rigoureux. Ils sont la principale source d'information pour les citoyens, permettant des décisions éclairées et renforçant la démocratie. Une presse indépendante est un contrepoids aux abus de pouvoir et aux violations des droits de l'Homme. Restreindre la liberté de la presse permet aux acteurs politiques d'agir en toute impunité, affaiblissant la responsabilité et l'état de droit.

Le cas spécifique de Gustavo Gorriti 

Journaliste d'investigation péruvien, Gustavo Gorriti est connu pour son travail dans la couverture des affaires politiques et de corruption en Amérique latine. Depuis le 27 mars, Gustavo Gorriti fait l’objet d’une enquête préliminaire. Effectivement, il est accusé de corruption présumée sur les procureurs qui étaient chargés d’enquêter sur les pots-de-vin versés par Odebrecht, entreprise de BTP brésilienne. 

Pour une autre enquête, Gorriti est accusé d'avoir influencé l'investigation sur Keiko Fujimori. Le procureur général a demandé à Gorriti de révéler ses sources et de fournir son numéro de téléphone, compromettant ainsi la protection des sources journalistiques. Cela soulève des inquiétudes sur l'intimidation des reporteurs au Pérou. Cette tentative de museler les journalistes et de limiter leur capacité à enquêter sur la corruption est une sonnette d’alarme pour les démocraties. D’après l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), 85 % de la population mondiale a connu un recul de la liberté de la presse au niveau national au cours des cinq dernières années. 

 

Noémie Yerly 

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